Les ordres présenté le 4 avril à la Cinémathèque québécoise en hommage à Jean Lapointe

Pour souligner le départ récent de Jean Lapointe, Éléphant présentera Les ordres de Michel Brault, le film dans lequel il a sans aucun doute tenu son rôle le plus mémorable au cinéma, celui du syndicaliste Clermont Boudreau. Que l'on ait déjà vu le film ou non, visionner la version restaurée des Ordres sur grand écran est une expérience puissante qui permet d'apprécier pleinement l'immense performance de Jean Lapointe, et de mesurer toute la portée et l'envergure de cette oeuvre bouleversante et incontournable. La projection aura lieu le 4 avril à la Cinémathèque québécoise.

En 2020, en plein confinement lié à la pandémie, Éléphant avait souligné les 50 ans de la crise d'Octobre, sans avoir pu organiser de projection des Ordres dû aux mesures de confinement. Cette crise, survenue au mois d'octobre 1970, est certainement un des événements politiques les plus marquants de l'histoire du Québec des 60 dernières années. Elle a mené à de nombreuses arrestations arbitraires de simples citoyens et a secoué tout un peuple, qui s'est senti blessé et humilié et porte encore aujourd'hui les traces de cette blessure. 

La fragilité de la démocratie, la perte arbitraire de nos libertés et les abus de pouvoir sont des sujets qui restent encore aujourd'hui tristement actuels.

À mi-chemin entre la fiction et le documentaire, Les ordres est basé sur le témoignage d'une cinquantaine de personnes emprisonnées à la suite de l'adoption de la Loi sur les mesures de guerre en octobre 1970. Nous suivons cinq personnages construits à partir de ces témoignages, de leur arrestation à leur libération. Le réalisateur du film, Michel Brault, innove en choisissant la couleur pour les moments de fiction, tandis que le noir et blanc très contrasté est réservé aux moments plus réels du film.

Ce film a permis à Michel Brault, décédé en 2015, d'obtenir le Prix de la mise en scène au Festival de Cannes en 1975. Il a aussi permis à Jean Lapointe, qui nous a quittés l'automne dernier, de montrer une facette plus dramatique et mesurée de son talent de comédien en personnifiant un ouvrier syndicaliste, père de trois enfants, qui se retrouve subitement en prison, laissé à lui-même, privé de ses droits. 

En 2015, lorsque le film a été présenté de nouveau à Cannes en version restaurée dans la section Cannes Classics, il est revenu sur sa performance bouleversante et sur son approche générale du jeu :

 

«Ce qui fait que je suis crédible au cinéma, comme à la scène, c'est que je ne joue pas. Je m'informe de tous les aspects du personnage auprès du réalisateur et je suis le personnage en question. J'ai pas à faire d'effort aucun, je laisse ça au réalisateur, son découpage et tout ça... Je veux pas savoir où est la caméra, je demande au réalisateur : "Dis-moi où je pars, quand je parle et où je m'arrête." Alors c'est très simple. Je pars, je suis le personnage, je suis imbibé du personnage, imprégné au maximum du personnage, et je n'ai aucun mérite à ça. Je suis viscéral. Je ne peux pas vous en dire plus... je suis comme dans la vie. Moi je ne joue pas. (...) Au cinéma, je suis comme je suis. C'est tout.»

 

Dans la foulée des 50 ans de la crise d'Octobre, Éléphant a aussi créé un dossier spécial qui donne la parole à différents artistes et artisans qui se sont intéressés au FLQ et à la crise d'Octobre. Deux interprètes du film, Claude Gauthier et Louise Forestier, ainsi que les cinéastes Mathieu Denis et Félix Rose partagent avec nous certaines réflexions qui nous permettent d'approfondir notre compréhension des Ordres, de découvrir certains secrets de tournage et de voir pourquoi cette histoire humaine aux enjeux universels est aujourd'hui considérée comme un grand film du cinéma mondial.