Le désir de tourner au Québec en hiver
Romaine par moins 30
Publié le 8 février 2010Paradoxalement, c'est en pleine crise du verglas, en 1998, que la cinéaste française Agnès Obadia a eu envie de tourner un film au Québec en plein hiver.
Douze ans plus tard, la voilà qui s'amène avec Romaine par moins 30, film qui prendra l'affiche en salles vendredi.
Encore sous le choc du cadeau de Noël offert par son fiancé (Pascal Elbé) et convaincue que l'avion qui les amène à Montréal va s'écraser, Romaine (Sandrine Kiberlain) décide de lui dire ses quatre vérités avant de mourir et... se retrouve toute seule à l'arrivée.
Chanceuse dans sa malchance, elle tombe sur une hôtesse prête à l'aider, mais rien, absolument rien ne se passera comme prévu...
«J'étais de passage à Montréal pour présenter Romaine, mon premier long-métrage, pendant la tempête de verglas et j'ai été vraiment impressionnée par toute cette solidarité des Québécois et par l'hiver. J'ai eu envie d'y amener le personnage de Romaine que je trimbalais depuis plusieurs années et je me suis mise à écrire tout de suite, avec l'idée de la placer dans une sorte de décalage, avec un humour proche de la dérision», raconte Agnès Obadia dans un entretien téléphonique.
De retour à Montréal quelques semaines après y avoir passé les vacances des Fêtes avec sa fille, la cinéaste s'étonne pratiquement d'avoir tourné en hiver.
«C'est curieux, j'ai été frigorifiée malgré le temps doux, alors que pendant le tournage, je n'ai jamais souffert du froid, même si nous tournions souvent de nuit et qu'il faisait régulièrement moins 30°! Je ne me serais pas vue refaire le film», dit la cinéaste.
«Mon amour du cinéma passe par des gens et des lieux. J'avais envie d'être là et de partager une histoire, de raconter ce Québec métaphorique, la chaleur de l'hiver», dit celle qui a toutefois tourné un autre film et un téléfilm avant de se remettre à l'écriture de Romaine par moins 30. Ce n'est finalement qu'à l'hiver 2008 que le film a été tourné dans la grande région de Montréal, mais aussi à Kanasuta, en Abitibi.
BIEN ENTOURÉE
«J'étais entourée d'une excellente équipe avec les gens de Max Films et de Louis Bélanger (Gaz Bar blues) qui a collaboré au scénario. C'est lui qui a trouvé les lieux pour construire l'itinéraire de Romaine. Une Française qui débarque n'a aucune idée de ce qu'est l'Abitibi. J'aurais aimé pouvoir y tourner plus d'une semaine, mais les contraintes budgétaires étant ce qu'elles sont...
«Pour moi, il était important que Romaine parte et se retrouve de plus en plus seule dans le paysage blanc pour aller retrouver son compagnon. C'est comme un parcours intérieur. J'ai dû couper beaucoup de choses, mais j'ai réussi à garder la fantaisie, le ton, et à maintenir le cap», soutient Agnès Obadia.
Si elle interprétait Romaine à l'origine, la réalisatrice dit connaître ses limites, ce qui l'a amenée à confier le personnage de Romaine à la comédienne française Sandrine Kiberlain.
«L'univers de Romaine fait particulièrement dans la fantaisie. Ce n'était pas évident, mais Sandrine a tout compris tout de suite», ajoute-t-elle, reconnaissant avoir l'intention de retrouver Sandrine Kiberlain dans la peau de Romaine, un jour.
«Pas un film raciste»
«Les personnages sont aussi loufoques que la situation, autant les Français que les Québécois. En tout cas, ce n'est pas un film raciste», dit avec humour Pierre-Luc Brillant, qui interprète Étienne dans Romaine par moins 30, aux côtés de Sandrine Kiberlain.
«J'ai trouvé le scénario intéressant pour son côté loufoque et décalé qui s'exprime très peu dans l'humour québécois. Ça ne tombe jamais dans le mépris ni la caricature. On n'a pas plus l'heure juste d'un côté ni de l'autre», dit le comédien, ajoutant que le film ne sert pas non plus une vision carte postale... sauf peut-être en ce qui a trait aux déneigeuses dans les rues de Montréal!
«Ce n'est pas une vision complaisante. J'ai trouvé ça bien. Même l'Abitibi est montrée pour ce qu'elle est», ajoute-t-il. Outre Pierre-Luc Brillant, la distribution québécoise comprend Louis Morissette, Maxim Roy, le couple Gilles Pelletier-Françoise Graton et Aubert Pallascio.
«Il n'y avait que des Québécois dans l'équipe, sauf la réalisatrice, Sandrine Kiberlain et Pascal Elbé. Heureusement d'ailleurs, parce que des Français n'auraient jamais pu 'toffer' ça. Il faisait vraiment -30°», dit le comédien au bout du fil.
Comme par hasard, le film a été tourné en partie en Abitibi, tout de suite après Je me souviens, d'André Forcier, dans lequel il a également joué, ce qui amène Pierre-Luc Brillant à dire qu'il a joué dans les deux films tournés à Val-d'Or en 2008.
On devrait par ailleurs le retrouver au grand écran en mars dans Les mots gelés, d'Isabelle d'Amour, de même que dans Y en aura pas de facile, une comédie de Marc- André Lavoie (Bluff) qui doit sortir en juin.