Un hymne à la solidarité
Coteau rouge
Publié le 7 septembre 2011Le cinéaste André Forcier s'est inspiré de son quartier de Longueuil, Coteau Rouge, pour écrire son nouveau film, une chronique familiale à la fois tendre et fantaisiste.
Présenté il y a deux semaines en ouverture du Festival des films du monde de Montréal, Coteau Rouge, 12e long métrage du réalisateur de L'eau chaude l'eau frette et La comtesse de Baton Rouge, suit le quotidien d'une famille tricotée serrée qui lutte pour garder son quartier intact, lequel est menacé par la prolifération de condos luxueux.
L'idée de départ de Forcier était de tourner un film à Coteau Rouge, le quartier ou il réside depuis plusieurs années. La question de la gentrification de son quartier, un problème qu'il observe depuis quelques années, s'est imposée naturellement.
«On n'a aucun respect pour le patrimoine ouvrier, martèle le cinéaste. On en a pour le patrimoine du Vieux Longueuil mais pas pour les quartiers ouvriers. Au lieu d'encourager la réparation des belles maisons déjà existantes dont certaines ont été bâties à l'avant-guerre, on rase sans hésiter des vieilles maisons pour y construire des immeubles à condos.
«Il y a bien des gens qui résistent, mais plusieurs acceptent de céder pour des raisons d'argent. Petit à petit, on va assister à l'embourgeoisement de Coteau Rouge comme on a assisté il y a plusieurs années à l'embourgeoisement du Plateau Mont-Royal.
«Mais le sujet principal du film, pour moi, ce n'est pas le problème de la gentrification mais plutôt la solidarité dont font preuve les personnages. La véritable solution pour les hommes est la solidarité.»
ACTEURS FIDÈLES
Encore une fois, André Forcier a pu miser sur une distribution de luxe réunissant notamment certains de ses acteurs les plus fidèles, dont Gaston Lepage, Roy Dupuis et Céline Bonnier.
Mario Saint-Amand, Paolo Noël, Louise Laparé et Bianca Gervais y ont aussi des rôles.
«Je considère que je travaille avec les plus grands acteurs du Québec, souligne Forcier. Je suis choyé, car ils acceptent de le faire pour des cachets beaucoup moins élevés que s'ils travaillaient pour des grosses productions.»
Tourné avec un budget mince, Coteau Rouge réunit tout ce qui caractérise l'univers singulier d'André Forcier (poésie fantaisiste, personnages décalés, dialogues finement écrits) avec une touche d'humour un peu plus prononcée.
«C'est voulu et assumé, précise le cinéaste.
«En écrivant le scénario, on s'est retrouvés avec des personnages drôles et des situations comiques à la limite du burlesque. On n'a pas voulu lutter contre cela. On s'est dit: tant mieux si ça nous permet d'élargir un peu notre public.»
Coteau Rouge prend l'affiche le vendredi 9 septembre.
Roy Dupuis aime être surpris par les rôles qu'on lui offre. Et le cinéaste André Forcier réussit cela à tout coup.
Dans Coteau Rouge, qui marque la troisième collaboration entre Dupuis et Forcier (après Les États-Unis d'Albert et Je me souviens), l'acteur joue le rôle d'un riche promoteur immobilier qui manigance pour acheter les maisons ouvrières de Coteau Rouge afin de les remplacer par des condos. Un personnage très loin de lui, il va sans dire.
«C'est un vrai rôle de composition, un contre-emploi, lance Dupuis.
«Mais c'est tellement plus le fun de s'éloigner de soi-même à travers ses personnages. Et puis j'aime beaucoup l'ambiance des plateaux de tournage d'André (Forcier), ses histoires et sa personnalité.
«En fait, je ne connais pas beaucoup d'acteurs qui diraient non à Forcier. Ses films sont tellement particuliers et bien écrits. C'est un cinéaste important au Québec. Il a son propre univers, une poésie. Je plonge là-dedans sans hésiter et je m'amuse à chaque fois. Je me sens privilégié qu'il m'appelle et qu'il me laisse entrer dans son univers.»
ANECDOTES
Avec Forcier, Dupuis se laisse d'ailleurs souvent convaincre avant même d'avoir lu le scénario.
«À chaque fois qu'il me propose un rôle, il m'invite à prendre un café pour en parler et pour me raconter le film de vive voix. C'est toujours passionnant. En me racontant son histoire, il ouvre plein de parenthèses, relate des anecdotes. Après, je repars avec le scénario pour le lire chez moi, mais en général, je sais déjà que je veux le faire.»
Roy Dupuis aura par ailleurs un automne très occupé. Il tournera la prochaine saison de la série télé Les Rescapés, avant de se rendre quelques semaines en Suisse pour le tournage du film Cyanure de la réalisatrice suisse Séverine Cornamusaz. Il y campera un père de famille qui s'apprête à sortir de prison.
Les personnages que propose André Forcier à Céline Bonnier ne s'assagissent pas avec le temps, bien au contraire.
Pour son quatrième film sous la direction de l'original cinéaste (après Le vent du Wyoming, Les États-Unis d'Albert et Je me souviens), Céline Bonnier hérite d'un rôle plutôt coloré, celui d'une femme qui se balade avec une fausse bedaine pour faire croire qu'elle est enceinte.
«Les rôles qu'André (Forcier) me proposent sont toujours un peu décollés, curvés, décentrés. C'est très intéressant pour une actrice. C'est sûr que quand Forcier nous envoie un scénario, on s'y plonge et on le dévore jusqu'à la fin. C'est toujours très excitant.»
Dans ce cas-ci, son personnage lui faisait aussi peur qu'il la séduisait.
«Je la trouvais pas mal flyée mais le danger là-dedans était d'éviter de trop en mettre pour ne pas tomber dans la caricature, souligne-t-elle.
«Mais c'est un souci qu'André Forcier a aussi toujours. Il veut que derrière leur folie, ses personnages demeurent le plus humains possible.»
COMÉDIE
Céline Bonnier, qu'on a souvent vue au cinéma dans des drames, apprécie également la dimension comique de son personnage, qui lui permet de s'éclater encore plus.
«J'aime jouer la comédie, lance-t-elle. Je l'ai fait aussi l'an passé avec French Kiss qui, sans être une grosse comédie, était plutôt léger.
«Ça me ressemble plus. Je ne fais jamais de drame dans la vie. Je suis plutôt joyeuse dans la vie et les films de Forcier me permettent d'exploiter ce côté de ma personnalité.»