Un tournage qui devient un camp d'été
French Immersion
Publié le 3 juin 2010Le réalisateur Kevin Tierney et son impressionnante brochette d'artistes, parmi lesquels on a pu compter Robert Charlebois, Pascale Bussières, Laurence Leboeuf et Karine Vanasse, ont accueilli les médias mercredi dernier sur le plateau de tournage du film French Immersion, à Saint-Césaire.
Bon cop, bad cop , produit par Tierney, est assurément le premier film canadien bilingue, mais l'idée avait déjà germé dans la tête de Francis Mankiewicz il y a 17 ans sous le titre French Immersion. La mort tragique du réalisateur avait avorté le projet, qui refait aujourd'hui surface entre les mains de Jefferson Lewis et Tierney.
La comédie bilingue met ainsi en scène cinq anglophones séjournant dans un petit village québécois afin d'apprendre le français. Prenant des airs de véritable camp d'été pour adultes, le film, malgré son caractère rassembleur, ne se veut nullement moralisateur selon Jacob Tierney, fils du réalisateur. «Mon père adore la culture, les langues, les mots et il adore faire des films où les gens découvrent le Québec. Il n'y a pas de message; il veut seulement amuser un grand public.»
«C'est un pays ambigu à cause de ses deux langues, de poursuivre Pascale Bussières, qui campe le rôle de Sylvie Tremblay, fille du sénateur (Robert Charlebois). Est-ce officiellement bilingue ou non? Faut-il vraiment être bilingue pour faire carrière en politique? Ce n'est pas un film qui répond à ces questions mais bien qui en fait état.»
Interrogée à savoir si le long métrage n'entretenait pas de stéréotypes, l'actrice a répondu par l'affirmative, précisant toutefois que «la culture se définit beaucoup par le stéréotype et dans le cadre d'une comédie, ça s'impose. C'est de l'autodérision. On a l'impression que ce sont des clichés mais pour quelqu'un qui n'est pas habitué à cette culture, ce sont tout de même les premières choses qu'il va constater.»
Karine Vanasse vit pour sa part cette dualité anglophone/francophone dans la fiction comme dans la réalité : «Fred Ewanuick, avec qui je joue la plupart de mes scènes, ne parle pas vraiment français. Dans la vie comme dans mon personnage, je me dois de parler très lentement en français», a-t-elle plaisanté.
Deux solitudes en autodérision
Robert Charlebois en sénateur plutôt relaxe - il a néanmoins assuré avoir d'autres scènes où il porte fièrement une cravate ornée de fleurs de lys - renoue non sans engouement avec le jeu. «Je fais un film tous les dix ans. Je suis rouillé! Je vois mes collègues, et je suis un vieux Ford comparé à des Ferraris», a-t-il blagué.
L'auteur-compositeur-interprète s'est dit immédiatement séduit par le scénario, réunissant les deux solitudes. «Je pense que le Canada a intérêt à protéger la langue française. Il a besoin de nous pour demeurer différent. Autrement, les Canadiens deviendraient des Américains.»
Lui-même bilingue, Kevin Tierney s'est imbibé des deux cultures. «Je suis né ici, je suis un anglophone et j'ai appris le français à l'âge de 26 ans. Je m'amuse avec la différence», a-t-il raconté.
S'il admet qu'un tel scénario aurait été difficilement réalisable il y a près de 20 ans, il soutient qu'il a aujourd'hui plus que jamais sa place dans le paysage canadien. «On s'est assez chicané sur ce sujet. On peut commencer à en rire», a lancé le coscénariste, Jefferson Lewis.
Et quelle sera la version française du titre? «En français tabar...» a lancé mi-moqueur le réalisateur.
Dans la peau de...
Sénateur (Robert Charlebois) : «Tout tourne autour de l'école, dont je suis propriétaire. C'est un beau défi, parce que ce n'est pas un trop gros rôle, mais c'est plus dur que de jouer aux cowboys avec Sergio Leone aux États-Unis. Quand tu fais un western, c'est le cheval qui tourne à gauche, pas toi. Dans une comédie, il faut que tu sois vrai que tu n'essaies surtout pas d'être drôle.»
Sylvie Tremblay, fille du sénateur (Pascale Bussières) : «C'est une petite bourgeoise qui s'habille comme si elle s'en allait à la Maison blanche. Elle est très opportuniste, carriériste et chérit un peu les mêmes ambitions politiques que son père. Elle a sincèrement en elle une conscience collective.»
Julie Tremblay (Karine Vanasse) : «Je suis la professeure qui croit vraiment, en deux semaines, pouvoir apprendre le français à ces gens. Elle voudrait tant que son village réussisse à aller chercher une certaine notoriété avec cette école.»
Chantale (Laurence Leboeuf) : «Elle est un peu grungy, mais pas rebelle. Elle est en fait très sympathique. Mes parents (Diane Lavallée et Marcel Leboeuf) sont aussi mes parents dans le scénario.»
Jonathan Hornstein (Jacob Tierney): «Je joue un Américain qui arrive ici pour apprendre à parler français parce qu'il veut être chef cuisinier français : un fantasme de mon père!»
Réalisateur (Kevin Tierney) : «Quand tu es producteur, tu crois que tu es Dieu; quand tu es réalisateur, tu es vraiment Dieu. Tout le monde est prêt à faire quelque chose pour toi. J'adore ça.»
French Immersion prendra l'affiche le 1er juillet 2011 à travers le Canada.